La vieille qui faisait un tapis avec des pointes de porc-épic
Il était une fois une vieille.
Il était une fois une caverne.
Il était une fois une vieille qui vivait dans une caverne.
Plus vieille que le monde, plus vieille que le temps.
Une vieille si vieille que ses joues étaient creusées de profonds sillons.
A ses côtés un grand chien noir.
Dans l'âtre, un pot de terre où cuit une soupe depuis le début des temps les plus anciens.
Dans
ses mains, un tapis qu'elle tisse avec des pointes de porc-épic. Si
dures qu'elle est obligée de les ramollir avec ses dents. Ses dents
toutes usées, ses dents toutes cassées.
De temps à autre, elle se lève pour tourner la soupe. Le chien en profite pour ôter des pointes de porc-épic au tapis.
Lorsque
la vieille s'assied à nouveau, elle reprend son ouvrage comme si de
rien n'était. Elle ne dit rien. Elle ne reproche rien.
Ainsi, le
tapis n'est-il jamais achevé. Du reste : tant mieux. S'il s'avérait
qu'elle y parvienne, le monde s'arrêrait de tourner et l'humanité se
tarirait.